• Chapitre 13: Si je meure...

    LANGUE PAR DÉFAUT: YAUTJA

    Date sur Terre: 15 février 2117

    Sofia avait été entraînée pendant 3 mois par Abbie et Zak'dha. Abbie mettait toujours de la force lors des entraînements, et plus le temps avançait, plus elle se donnait à fond. Zak'dha, elle, avait commencé en douceur, pour faire progresser petit à petit Sofia. Au début, Zak'dha ne mettait presque aucune force lorsqu'elle apprenait à Sofia à se défendre, mais comme le temps avançait, Sofia progressait tout doucement, sans forcément s'en rendre compte tout de suite, et comme elle progressait, Zak'dha mettait un tout petit peu plus de sa force dans les entraînements lorsqu'elle savait que Sofia était capable. Un peu plus de force était démontrée par Zak'dha, et parfois elle montrait aussi à Sofia ses progrès, en prenant la même force que lors des premières séances, et comparait ensuite avec la force utilisée à présent. Et en faisant cela, l'Elder en chef n'avait même pas eu besoin d'utiliser toute sa force de Yautja. Sofia, elle, avait pris un peu plus confiance en elle. Elle s'était concentrée pendant les entraînements, elle arrivait à utiliser les techniques apprises par Zak'dha. Elle échouait parfois, mais elle continuait, et elle progressait. Mais son caractère pacifique ne s'était pas éteint pour autant. Elle n'avait toujours pas envie de blesser Räh'ma malgré tout. En revanche, Sofia avait gagné en souplesse, en réflexe, un peu en endurante (elle devenait moins fatiguée après les journées d'entraînement) et un petit peu en muscle.

    Mais ce n'était pas la seule chose que Sofia avait apprise pendant ces trois mois. Elle avait appris à parler Yautja, notamment pendant les repas avec Abbie, Gaäl, G'drasiil, Räh'gnar, et parfois Zak'dha. Sofia savait la parler presque couramment à présent, mais n'oubliait pas les autres langues qu'elle connaissait: l'anglais, le russe, la langue des signes. Et en sachant parler Yautja, elle pouvait parler avec Räh'gnar et G'drasiil. G'drasiil était fou de joie de pouvoir enfin dialoguer directement avec son amie. Avec Räh'gnar, en revanche, Sofia ne discutait pas trop, ou plutôt, elle n'osait pas trop. Le matin, c'était bonjour, le soir c'était bonne nuit, parfois c'était merci, parfois il y avait une toute petite discussion, mais Sofia n'osait pas parler davantage avec lui. Ils ne parlaient pas souvent ensemble. Pourtant, un jour, alors qu'il faisait assez chaud l'après-midi, Sofia était allée se baigner à la rivière. L'entraînement avait été raccourci, à cause de la chaleur. Certes sur Terre, on était à l'approche de l'hiver et en général il fait froid, mais là, nous étions sur une autre planète, et qui plus est, une planète avec de la jungle et un climat tropical. C'était différent.

    Sofia, ce jour-là, avait pris avec elle son matériel de dessin. Et alors qu'elle s'était assise sur la berge après s'être baignée, Räh'gnar était venu la rejoindre.

    Sofia: Tu as l'intention de te baigner?

    Räh'gnar: Je voulais surtout savoir ce que tu faisais.

    Sofia: Je dessine la nature, tout simplement. J'ai eu très peu d'occasions pour dessiner d'après nature ces derniers temps, en général je dessinais de mémoire, ou alors je notais plein de choses dans mes carnets.

    Räh'gnar: Je peux regarder?

    Sofia: Oui, bien sûr.

    Elle lui montrait les dessins qu'elle avait fait.

    Sofia: Prends-le.

    Elle lui donna le carnet.

    Räh'gnar: C'est impressionnant. Et c'est joli.

    Sofia: Merci.

    Sofia regardait les mains de Räh'gnar qui tournaient les pages.

    Sofia: ... Tu permets?

    Sofia prit le carnet et le posa à côté d'elle, puis elle prit la main de Räh'gnar.

    Sofia: Puis-je dessiner ta main en détail? Je n'en ai pas beaucoup dessiné, des mains de Yautja...

    Räh'gnar: Si ça te fait plaisir...

    Sofia examina pendant un petit moment la main de l'extraterrestre, puis la deuxième, puis les deux ensemble. Ce qu'elle ignorait, c'était que G'drasiil les regardait, caché derrière un buisson.

    Zak'dha: G'drasiil! Qu'est-ce que tu fais ici? Tu n'es pas allé étudier avec tes camarades?

    G'drasiil: Je suivais Sofia...

    Zak'dha: Tu ne la lâches vraiment pas d'une semelle...

    G'drasiil: Si, ça m'arrive, parfois, mais je voulais voir ce qu'elle venait faire ici, si elle allait dessiner. ... Dis, Zak'dha, pourquoi elle lui prend les mains comme ça?

    Zak'dha: ... Je pense qu'elle les examine pour les dessiner, mais... On pourrait plus penser qu'elle est en train de courtiser.

    G'drasiil: Courtiser?

    Zak'dha: Quand des humains se prennent les mains, en général, c'est parce qu'ils sont amoureux.

    G'drasiil: Les humains ne s'offrent pas des choses pour se courtiser?

    Zak'dha: Si. Mais pas toujours. Les humains ont plusieurs façons de se montrer qu'ils s'aiment.

    G'drasiil: Mon oncle ne nous a jamais parlé de ça.

    Zak'dha: Parce que vous êtes encore jeunes, mais aussi parce que nous, les Yautjas, nous ne ressentons l'amour que très rarement. Et je ne parle pas de l'amitié, ni de l'affection que tu portes à Räh'ma ta mère. Là, c'est une toute autre forme. Viens G'drasiil, ils ont besoin d'être seuls.

    G'drasiil: ...

    Zak'dha: Fais-le pour Sofia.

    G'drasiil: D'accord Zak'dha...

    Il suivit l'Elder à contrecœur, se retournant une dernière fois pour voir Sofia, souriante, dessiner les mains de Räh'gnar, avant qu'il ne tourne le dos à la scène et s'en aille.

    Räh'gnar et Sofia ne s'étaient pas rendus compte qu'ils avaient été vus ensemble. Mais seuls Zak'dha et G'drasiil avaient vu ce qui s'était passé, et ils n'avaient rien dit. G'drasiil n'osait pas parler à Sofia, surtout que Zak'dha le lui avait interdit. "Imagine comment ta maman réagirait, et comment Sofia réagirait. Certes elle est gentille, mais même un être doux peut se mettre en colère. Garde le secret, d'accord?" lui avait-elle dit. Ainsi G'drasiil s'était tu.

    Depuis ce moment que Sofia et Räh'gnar avaient partagé ensemble, Sofia s'était un peu plus ouverte à lui parler, mais elle gardait un peu ses distances quand même. Räh'gnar était gentil avec elle, mais il ne la brusquait pas, il ne se montrait pas familier avec elle. Sofia non plus. Pourtant, quelque part, ce moment les avait rapprochés.

    Aujourd'hui, entraînement, comme d'habitude. C'était la fin de la journée.

    Zak'dha: *mise à terre par Sofia* C'est bon, on a fini pour aujourd'hui!

    Sofia: D'accord.

    Zak'dha se releva.

    Zak'dha: Sofia, je pense que tu es enfin prête.

    Sofia: Tu penses?

    Abbie: Je suis de son avis. Tu as fais de vrais progrès en trois mois.

    G'drasiil: Et en plus tu as appris à parler notre langue pendant ce même temps! C'est fou!

    Sofia: *sourit* J'apprends vite, quand je veux.

    Zak'dha: Je vais dire à Räh'ma que tu vas pouvoir l'affronter.

    Räh'gnar: ...

    G'drasiil: ...

    Sofia: ...

    Gaäl: Vous en faites une tête vous trois!

    G'drasiil: Dès que maman saura que Sofia est prête...

    Sofia: ...

    Abbie: Oh mais tu ne vas pas recommencer! On t'a entraînée pendant trois mois, tu as progressé, et Zak'dha dit que tu es enfin apte à affronter Räh'ma!

    Sofia: Elle reste plus forte que moi... Et je pense que toi et Zak'dha, vous n'avez fait que des cajoleries, à côté de ce qui m'attend...

    Abbie: Ah bah ça c'est sûr, Räh'ma va être plus agressive que nous. Mais toi tu n'as qu'une seule chose à faire: tu la blesses, et c'est bon!

    Sofia: Je ne sais pas comment je vais faire...

    Abbie: Arrête de te morfondre!

    Sofia: ...

    Zak'dha: ...

    Elle s'en alla à la hutte de Räh'ma, qui était toujours assise sur son trône.

    Zak'dha: Räh'ma, Sofia est suffisamment compétente pour t'affronter. Son entraînement a porté ses fruits.

    Räh'ma: Oh, formidable. J'ai hâte de voir ça. Par contre, je ne ferai pas preuve de pitié, je maintiens mes règles: je la tue ou elle me blesse, peu importe comment.

    Zak'dha: Elle reste déterminée à  ne pas vouloir te faire de mal.

    Räh'ma: Décidément...

    Zak'dha: Si je peux me permettre, Räh'ma... Je pense que Sofia et Räh'gnar commencent petit à petit à nouer une idylle...

    Räh'ma: Que veux-tu dire par là?

    Zak'dha: Je crois qu'ils s'aiment.

    Räh'ma se mit à rire.

    Räh'ma: Ha! Ha! Ha! Räh'gnar amoureux? D'une Ooman en plus?

    Zak'dha: Sofia est toujours gênée quand il est là, elle n'ose jamais le regarder directement. Et lui, il la regarde d'une façon...

    Räh'ma: Allons, ne dis pas de sottises!

    Zak'dha: Abbie et Gaäl se chamaillent mais s'apprécient au fond...

    Räh'ma: N'essaie pas de m'influencer, Zak'dha. Je ne changerai pas mes plans. Tu as pitié de cette faible?

    Zak'dha: Pardonne-moi mais ton fils G'drasiil est le premier à l'apprécier énormément. Moi-même je l'aime bien, cette Sofia. Nous avons eu des discussions très intéressantes depuis qu'elle est parmi nous...

    Räh'ma: Ça fait trois mois que j'ai lancé ce défi. Et je ne reviens jamais sur ce que je dis. Je ne change jamais d'avis tu sais.

    Zak'dha: Je sais, Räh'ma. Mais je voulais juste t'en informer...

    Räh'ma: Elle est toujours déterminée à ne pas me faire de mal. C'est bien la preuve qu'on ne change pas les gens.

    Zak'dha: Räh'ma...

    Räh'ma: Je dois la tuer comme  je l'ai dit. Je ne te recommande pas d'intervenir dans le combat, ni toi, ni mon frère, ni mon fils préféré. Gaäl et Abbie se tiendront sûrement à carreau, mais c'est pareil pour eux.

    Zak'dha: ...

    Räh'ma: Le combat aura lieu après-demain, ça laissera le temps à notre Ooman de se reposer un peu après ces trois mois de dur labeur.

    Zak'dha: ...

    Zak'dha s'apprêtait à sortir, mais Räh'ma l'interpella alors qu'elle lui tourna le dos.

    Räh'ma: Fais-moi confiance, je sais ce que je fais depuis le début.

    Zak'dha quitta la hutte sans ajouter un mot. Elle alla annoncer à Sofia que le combat allait avoir lieu dans deux jours.

    Zak'dha: J'ai essayé une nouvelle fois de raisonner notre chef... Même en sachant qu'elle ne revient jamais sur sa parole. Je regrette, Sofia, je n'ai pas réussi.

    Sofia: Tu n'y es pour rien... Je pense que j'aurais dû retourner chez moi tant qu'il en était encore temps...

    Räh'gnar: Ne dis pas ça...

    Abbie: Tu ne vas pas abandonner maintenant!

    Räh'gnar: Je crois en toi, Sofia.

    Sofia: ... Räh'gnar...

    Räh'gnar: Tu vas réussir.

    Sofia: Non... Je vais perdre... Je ne vais pas y arriver... Je vais mourir...

    G'drasiil: Sofia, je veux que tu gagnes. Si tu disparais, je vais moi aussi avoir de l'eau qui coule de mes yeux!

    Sofia: ... G'drasiil...

    Zak'dha: On a confiance en toi. Montre-nous de quoi tu es capable. Et, ne te demande pas si tu vas y arriver, mais comment tu vas y arriver.

    Sofia: Comment je vais y arriver...? C'est impossible...

    Abbie: Tu as grandi seule avec ton chat et tu t'es débrouillée sans le moindre adulte pour t'aider! Tu as tout planifié après la mort de ta mère pour entretenir le vaisseau et t'entretenir toi-même! Raconte pas n'importe quoi! Si tu as réussis ça, tu réussiras à blesser Räh'ma!

    Sofia: Il y a quand même une différence entre vivre dans un grand vaisseau à entretenir seule et affronter une femelle Yautja qui veut ma mort...

    Zak'dha: ...

    G'drasiil: Tu y arriveras! On est tous avec toi!

    Abbie: Même Gaäl.

    Gaäl: Même pas vrai. Je ne suis pas avec cette sale humaine. On a perdu un temps monumental par sa faute! On est restés ici trois mois! C'en est plus qu'assez pour moi! Dès qu'elle se fera tuer, on s'en va!

    Sofia laissa échapper un petit rire.

    Gaäl: Qu'est-ce qui la fait rire, celle-là?

    Sofia ria de plus belle.

    Gaäl: C'était mieux quand elle ne parlait pas la langue en fait...

    G'drasiil: Pourquoi est-ce que tu ris, Sofia?

    Sofia: Parce que j'ai appris à vous connaître, tous. J'ai passé de formidables moments en votre compagnie, j'ai appris plein de choses. J'ai été heureuse d'être avec vous tous pendant tout ce temps.

    Puis elle les quitta, se rendant à la hutte de Räh'gnar. Elle alla dormir dans le lit, car elle avait compris depuis le temps que Räh'gnar voulait qu'elle y dorme. En tombant dans le sommeil, elle se remémorait sa vie: son départ de la planète Terre, leur arrivée sur Dto 411, la capture de Räh'gnar, sa libération, la mort d'Olga, celle de Socrate, sa rencontre avec G'drasiil, qu'elle appelait alors Octave, les leçons de piano, la rencontre avec Abbie, l'arrivée dans le clan, les moments passés avec tout ce monde qu'elle a rencontré.

    Pourtant, au milieu de la nuit, elle se réveilla. Pourquoi? Aucune idée. Mais elle se leva et marcha sans bruit jusqu'à son sac. Là, elle prit sa lampe torche et farfouilla sans bruit, pour éviter de réveiller Räh'gnar. Elle attrapa son carnet et un stylo et écrivit dedans. Elle avait épuisé plusieurs carnets de dessins et de notes depuis ces trois mois, mais elle avait anticipé en en prenant plusieurs, et en faisant attention quand elle prenait des notes, à garder le plus de place possible, en restant tout de même lisible.

    Sofia

    "Cher journal,

    À l'heure où j'écris ces lignes, nous sommes dans la nuit du 15 au 16 février 2117. J'ignore exactement l'heure qu'il est, ni même pourquoi je me suis réveillée. Mais mon instinct me pousse à agir et à t'écrire maintenant, même si je t'ai écrit avant d'aller dormir, comme à mon habitude.

    Mon combat contre Rama a lieu après-demain. Je suis stressée. Je sais que mes amis m'ont donné leurs encouragements tout à l'heure, mais j'ai toujours peur. Je vais très probablement mourir... C'est pourquoi je tiens à écrire mes dernières volontés. Demain je les ferai savoir, et je mettrai en ordre mes affaires. Voici mes dernières volontés:

    Si je meure, je souhaite avant tout que mes affaires soient ramenées au vaisseau. Je veux que toutes mes recherches soient sauvegardées si possible dans les fichiers de l'ordinateur du vaisseau. Ensuite, il faudra désactiver l'entretien automatique du vaisseau. Lorsque ce sera désactivé, Scylla se rendra compte que le dernier membre du vaisseau, c'est-à-dire moi, est mort, et Scylla s'endormira. À ma mort, je souhaite que mon corps soit enterré auprès de ma famille: maman, Socrate, papa. Je ne veux pas que mon pendentif me soit retiré, de même que ma mèche artificielle. Mon pendentif est rattaché à ma famille et à mon père, car c'est lui qui m'en avait fait cadeau, et ma mèche se rattache à ma mère, car elle avait l'habitude de natter ses cheveux avec plusieurs d'entre elles.

    Si je meure, Rama pourra prendre mon crâne si elle le désire, mais je souhaite être enterrée avec les miens, et que ma mèche et mon pendentif me restent.

    Si je meure, je souhaite céder mon piano à Gdrazil. Et attention, je dis bien le mien. Pas ceux que j'ai fabriqués pour lui, mais bel et bien le mien, c'est-à-dire le piano à queue noir. Que Gdrazil vienne y jouer librement, comme bon lui semblera. Après tout, Scylla est facile d'accès pour lui. Je lui léguerai d'ailleurs toutes mes partitions, qui sont rangées dans la salle de musique et dans ma chambre.

    Quand j'affronterai Rama, je sais qu'Abbie et Gal assisteront au combat, tout comme Gdrazil, Ragnar et Zagda. Je tiens à vous, les amis, je vous remercie d'avoir été là, de m'avoir entraînée, soutenue, supportée, même.

    Si je meure, je cède à Ragnar mes dessins de Yautja que j'ai effectués. J'en cède également une partie à Gdrazil, car je sais qu'eux deux ont aimé ce que j'ai fait.

    Si je meure, je lègue à Zagda l'intégralité des livres humains en anglais qui se trouvent dans le vaisseau. Zagda m'a aidée à apprendre le Yautja, je lui ai en échange appris à lire l'anglais, comme elle le parlait déjà. Ces livres sont des livres d'histoires, de contes, de sciences, de mathématiques... La majorité c'est de la philosophie, mais Zagda pourra se servir et prendre ceux qu'elle veut si certains dans l'intégralité ne lui plaisent pas.

    À Abbie et Gal... Je ne sais pas exactement quoi leur céder... Mais... Parmi les livres que je possède, il y en a un qui m'a marquée. Petite je ne l'aimais pas, mais maintenant, avec le recul, même si c'est une fiction, j'éprouve de la nostalgie en y pensant. Abbie, Gal, je suis désolée d'être injuste, mais je vous cède, en premier, le livre de conte Babayaga, en russe. Je sais que ce n'est rien du tout, surtout comparé à ce que j'offre aux autres, mais ça a été difficile pour moi de trouver quoi vous offrir à ma mort. Je sais aussi que vous ne comprendrez sûrement pas ce qui est écrit, mais les illustrations à côté du texte vous aideront. Avec le recul, je tiens à ce livre qui m'a marquée, et je sais qu'il sera entre de bonnes mains. Je cède à Abbie les bijoux des passagères du vaisseau. Ils sont dans les tiroirs des chambres. Je sais que je ne suis personne pour les donner comme ça, mais après tout, je suis devenue la seule maîtresse à bord, et je ne les ai jamais portés. Même en sachant qu'ils sont là (car j'avais fouillé le vaisseau, à l'époque, pour mettre de l'ordre), je n'y ai jamais touché. Je sais qu'ils sont toujours dans ces tiroirs que je n'ai jamais vidés. Et pour Gal... Il y a des crânes humains dans la partie "science et médecine" du vaisseau. Il y a aussi des crânes d'animaux. Ce sont des vrais, pareil pour les squelettes. Tu peux les prendre, je te les donne. Ces crânes appartenaient aux médecins du vaisseau, ils les avaient emmenés. Vraiment, crois-moi sur parole, ce sont des vrais. J'ai vérifié. Mais je pense que tu t'en rendras compte aussi, tu es un expert...

    J'aimerais revenir sur Ragnar. J'ai une confession à faire...

    Ragnar, depuis que je suis dans le clan... Quand tu me tournes le dos, je ne peux pas m'empêcher de te regarder... Je dois t'avouer que ton corps m'obsède: il est si beau, tout en muscles, si bien taillé... Tu es plus beau et plus parfait qu'une statue romaine. Je te trouve magnifique. Et ton visage... N'importe quel être humain trouverait te trouverait monstrueux. N'importe quel être humain trouverait ton espèce affreuse dans tous les sens du terme. Pas moi. Je te trouve mignon. Je te trouve adorable. Et lorsque nos regards se sont croisés l'autre jour... Lorsque tu m'as fait te regarder dans les yeux... Je les ai trouvés magnifiques. Tes yeux sont humains, ce ne sont pas ceux d'un monstre. Tu es magnifique. Tu es un dieu. Tu es MON dieu. Les Romains ajoutaient à leur mythologie des dieux qui n'étaient pas romains (ou grecs, puisque seuls les noms changent entre ces deux mythologies), comme par exemple Isis, une déesse égyptienne. Moi, j'ai ajouté Cetanu. Mais je t'ajoute toi aussi. Et finalement, je te garde. Je ne garde plus que toi. Tu es mon dieu, mon Dieu unique.

    Je dois te remercier d'avoir veillé sur moi. Merci aussi de m'avoir amenée dans ton clan. Si je meure, ne te sens pas coupable. Grâce à toi j'ai pu apprendre beaucoup de choses. J'ai été heureuse de passer du temps parmi les Yautjas. Merci pour tout, Ragnar.

    Il faut aussi que tu saches autre chose... Je suis tombée amoureuse de toi. Tu t'es montré gentil avec moi, tu m'as protégée, tu m'as accueillie, et je ne saurais jamais te remercier suffisamment. Petit à petit, je suis tombée amoureuse de toi. Je sais qu'il est tard pour te le dire. Mais je n'ose pas beaucoup te parler. Je n'aurais jamais pu me déclarer à toi, je ne m'en sens pas le courage. J'espère que tu n'en souffriras pas trop... Si je meure, nous ne pourrons pas vivre ensemble. Je sais que c'est prétentieux de ma part d'insinuer, voire d'affirmer que tu pourrais aussi m'aimer en retour, mais je préfère être claire, sincère, et anticiper. Mais si je meure, nous deux, nous ne saurons pas ce qui aurait pu être. Tout s'est passé trop vite. Et puis, admettons que je me sois déclarée... Cela n'aurait rien changé. Cela n'aurait pas évité le combat. Ma soif de curiosité m'a poussée là, je paie le prix maintenant. J'aurais pu partir pendant qu'il en était encore temps, mais j'ai tenu à en savoir plus sur ton peuple, alors je suis restée, même en sachant que mes chances de mourir sont extrêmement élevées, qu'il n'y a probablement plus que la mort au bout du tunnel.

    Peut-être que ces trois mois d'entraînement porteront leurs fruits... Mais je doute fortement de ma victoire... Je n'arriverai jamais à blesser Rama... Cependant... Plus j'écris dans mon journal, plus je sens en moi comme une volonté de rester en vie...

    Et si à présent je voulais rester en vie non pas pour savoir et apprendre, mais pour Ragnar?"

    J'avais enfin fini d'écrire. J'ai dû passer un bon moment à le faire, lorsque je me suis relue. Je commençais à avoir les paupières lourdes. J'ai alors rangé mes affaires, puis je suis allée me recoucher. Je n'ai pas eu le temps de repenser à mes souvenirs, cette fois, car je me suis endormie directement.

    À suivre...

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    Notes:

    -chapitre totalement improvisé, fait à partir de rien! Bon, il était prévu que Sofia soit entraînée pendant 3 mois par Abbie, mais c'était le seul truc écrit qui me restait, vu qu'on n'avait pas pu faire davantage. Pour ce qui suivra, on continuera probablement à faire encore un peu d'écriture ensemble...

    -Je voulais que dans ce chapitre il y ait aussi le lendemain où Sofia dit ses dernières volontés, et je comptais peut-être même ajouter le combat, mais... Comme j'ai poursuivi le chapitre à la 1ère personne, et que je partais carrément dans le journal de Sofia et que ça devenait le sujet du chapitre (ses dernières volontés), j'ai décidé que le titre du chapitre allait être ce qui se répétait le plus dans son testament. Et puis pour une fois c'est une phrase (ou plutôt un bout de phrase) du chapitre qui est le titre. ^^

    -en parlant du journal, vous vous demandez certainement pourquoi j'ai changé l'orthographe des noms (sauf pour Abbie). Très simple: Sofia écrit ce qu'elle entend. Elle n'est pas à ma place, elle ne sait pas que Räh'gnar ne s'écrit pas Ragnar et ainsi de suite. Les Yautja et les humains n'ont pas le même alphabet, alors Sofia doit un peu adapter... Elle pense que les noms s'écrivent comme ça car c'est cette sonorité qui lui vient (du moins c'est comme ça que je les entend, les noms, quand je les prononce dans une discussion) quand elle entend les noms.

    -Je voulais aussi mettre la scène où Sofia inspecte les mains de Räh'gnar et parler de "courtiser", tout ça... Bon OK ça fait comme si G'drasiil était voyeur mais ce n'est pas le cas je vous assure! Il aime beaucoup Sofia et commence à se rendre un peu compte de quelque chose, malgré son jeune âge. Il est curieux, et puis Sofia n'appartient pas à la même espèce que lui! De plus il sait qu'il ne faut peut-être pas toujours être dans ses pattes, alors il l'observe de loin. (Zak'dha était à sa recherche quand elle l'a trouvé.) Je sais que cette scène s'emboîte peut-être un peu mal dans ce chapitre... Mais j'avais envie de la mettre. J'hésitais à la mettre plus tard mais finalement je l'ai mise maintenant. J'ai peut-être eu tort... On verra bien.